Construite vers 1754, l’église actuelle de Rupt-sur-Saône répond à la solution architecturale de l’église-halle. Il s’agit d’une nef composée de trois vaisseaux d’égale hauteur et supportée par une succession de colonnes à ordre toscan. Ce parti déjà employé à l’époque gothique renaît après le Concile de Trente (milieu du XVIe siècle). Baignant d’une grande clarté l’espace intérieur des sanctuaires, ce concept vise surtout à souligner symboliquement le triomphe de l’Eglise catholique.
Durant le règne de Louis XV, la Franche-Comté bénéficie d’une conjoncture favorable. La population augmente si bien que les lieux de cultes sont désormais trop étroits. Tirant parti de leurs ressources forestières, les communautés d’habitants entreprennent les travaux nécessaires aux agrandissements. Cette situation leur offre donc un prétexte pour reconstruire entièrement les édifices dans un goût homogène et moderne. Tel en est le cas à Rupt-sur-Saône, dont les projets de l’église sont dus à l’architecte bisontin Jean-Joseph Galezot et à l’entrepreneur Hugues Faivre. Outre le soin laissé au traitement général du gros-œuvre, l’intérêt de cet édifice réside dans la qualité d’exécution du décor intérieur. Il est en effet assez rare de trouver un programme de lambris aussi abouti et déployé tant dans la nef que dans le choeur. Le mobilier liturgique en grande partie conservé matérialise la synthèse entre d’une part la retenue du classicisme et d’autre part la liberté du motif rocaille.
L’iconographie axée sur les grands Mystères du culte de la Vierge s’illustre notamment par un chef d’œuvre du XVIIe siècle. Il s’agit d’une Vierge à l’Enfant attribuée à Corneille Michel II actif à Versailles et élève de Nicolas Poussin.
Place forte dès le XIIe siècle, le château de Rupt-sur-Saône s’inscrit au centre d’un appareil défensif visant à contrôler et protéger stratégiquement les bords de Saône. Bâti à flanc de colline, cet ensemble architectural se déploie autour d’un vaste parc dont l’aménagement n’est pas sans rappeler l’esthétique du jardin à l’anglaise. Il s’agit d’un écrin naturel organisé autour de huit édifices.
Berceau médiéval d’une puissante famille seigneuriale comtoise, ce lieu de mémoire évoque le passage successif de plusieurs grandes figures politiques du royaume. Tour à tour Grand Chambellan du duc de Bourgogne puis de Charles Quint, les seigneurs de Rupt cumulent au XVIIe siècle des charges honorifiques à la cour de France. Familiers des rois Bourbon, leurs séjours se partagent entre Rupt, Cheverny, Versailles et Paris. Au milieu du XVIIIe siècle, le château et ses terres changent de mains. Ils sont acquis par un riche financier parisien. Pierre II Grimod d’Orsay, célèbre collectionneur d’antiques joue alors un rôle prépondérant dans l’émulation du goût néo-classique en France. Devenu un exemple pour la haute aristocratie, il s’affiche comme l’un des plus grands mécènes de son temps. Contraint de vendre ses prestigieuses collections au moment de la tourmente révolutionnaire, le comte d’Orsay s’exile en pays germanique. Ainsi dépossédé de ses propriétés, il assiste impuissant à la destruction de la forteresse de Rupt en 1792. Néanmoins, face à cette ultime épreuve, le symbole du pouvoir seigneurial ne meurt pas. Avec le souffle romantique du XIXe siècle, l’imposant donjon est restauré. Dominant fièrement les plaines de Saône, il témoigne toujours de la splendeur passée d’un patrimoine universel et accessible à tous.
Dominant à l’Est le village de Rupt-sur-Saône, le couvent des minimes est construit de 1701 à 1710 sous le haut patronage de Louis de Clermont de Cheverny, seigneur de Rupt et ambassadeur de Louis XIV. Succédant à un ancien prieuré peu commode pour loger les disciples de saint François de Paule, cet édifice est conçu sur les plans de l’architecte Claude-Antoine Aillet. A l’aube du Siècle des Lumières, ce dernier est le seul architecte franc-comtois capable d’effectuer une telle entreprise. Devant l’affaiblissement général de la région suite aux conquêtes du Roi-Soleil, les grands chantiers monastiques sont gelés au détriment des fortifications de la ville de Besançon par Vauban.
Les bâtiments conventuels organisés autour de trois ailes dévolues au logement des révérends pères minimes se clôturaient au Nord par l’église. De cet ensemble progressivement détruit au court du XIXe siècle, il ne reste qu’une partie du mobilier liturgique de l’église dispersé après les grandes ventes révolutionnaires et actuellement conservé dans des communes limitrophes.
L’iconographie de ces œuvres traduit d’une part les bienfaits (fécondité, guérison, patron de la bonne mort…) du fondateur de l’ordre et d’autre part l’attachement au culte régional de Notre-Dame de Consolation. Possédant une image miraculeuse de la Vierge, les minimes comtois s’efforceront à en promouvoir le souvenir et asseoir les préceptes de la cour pontificale en matière de spiritualité.
Petite histoire de Rupt sur Saône
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